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Le parentage de proximité

Voilà presque un an que je blogue et que j’écris sur les différents aspects de la maternité, de la parentalité, qui me touchent et m’inspirent.  Avant tout, je me décris avec conviction (vous le savez, toute cette saga des dernières semaines l’a tellement montré) comme maman proximale.  Les valeurs et les façons d’agir que je mets de l’avant dans mes billets témoignent de ce choix de vie qui n’en est pas un, qui s’est gentiment imposé à moi.

Mais je constate que je n’ai jamais pris jusqu’ici la peine de définir formellement ce qu’est le parentage de proximité.  Alors que, probablement, j’aurais bien fait de commencer par là, d’écrire mon tout premier billet là-dessus.  Une lacune que je tente de combler maintenant en me disant que… hé bien… tout de même… mieux vaut tard que jamais… non ?

Le parentage de proximité est une vision de la parentalité, une façon de l’appréhender.  Il se fonde sur un ensemble de valeurs dont les principales sont le respect et l’écoute :  respect des besoins du bébé, respect de son rythme, de ses forces et de ses faiblesses, de ses particularités, de son individualité.  À la base, il y a l’amour.  Il y a aussi cette idée si simple :  le bébé est un être humain ;  il est une personne à part entière, avec ses émotions, son caractère, ses qualités, ses forces.  Le rôle de parent se définit comme la poursuite d’un objectif fondamental :  permettre à ce bébé unique un développement optimal dans toutes les sphères de sa personne, du développement moteur au développement intellectuel, en passant par les capacités socio-affectives, la bonne santé du corps et de l’esprit, ainsi que de belles valeurs vécues au quotidien.  De ce fait, la proximité est d’abord physique mais pas seulement.  La disponibilité émotionnelle est tout aussi fondamentale.

Or, toutes ces valeurs sont jolies en théorie, mais vous avez certainement hâte de voir comment tout cela se présente concrètement, dans les comportements, dans ces gestes que les parents proximaux posent… et ceux qu’ils refusent.  Voici donc, puisque mon esprit cartésien aime tellement les listes et les synthèses, la déclinaison de tous les comportements que l’on associe au parentage de proximité (en espérant que je n’en oublie pas… mais en ce cas, je compte aussi sur certain(e)s d’entre vous pour me rappeler à l’ordre comme vous savez si bien le faire 😉 ).

Bien sûr, dans cet ensemble, chaque parent se retrouve davantage dans quelques comportements et peu dans d’autres ;  rarissimes sont les parents proximaux qui pratiquent à fond le tout.  Il ne s’agit pas d’une check-list où plus vous cochez de cases, plus vous obtenez de points à inscrire sur votre diplôme du parent parfait.  Car le parentage de proximité est d’abord et avant tout une philosophie de vie basée sur l’amour, et les différents comportements décrits ne sont que des manières concrètes parmi d’autres d’exprimer en gestes cet amour.

Les pleurs

Pour le parent proximal, les pleurs sont pour le bébé une façon d’exprimer un besoin :  faim, inconfort, fatigue, douleur, froid, peur, ennui, etc.  Le bébé ne pleure jamais pour rien.  Il ne pleure jamais par caprice ou dans le but de manipuler.  Il pleure parce qu’il a un besoin à communiquer, et qu’il ne sait pas encore l’exprimer autrement.

Par conséquent, pour le parent proximal, les pleurs exigent toujours une réponse rapide.  Jamais on ne laisse pleurer bébé, jamais on ne lui impose volontairement de délai d’attente, jamais on ne pratique de « contrôle des pleurs » ou de « dressage au sommeil » (méthode du 5-10-15, etc.).  Il importe d’être à l’écoute et de répondre promptement du mieux que l’on peut à la demande du bébé.  Cela implique d’abord de réconforter le bébé, de lui exprimer de la sympathie, puis de chercher la cause des pleurs.  La plupart du temps, cela sera si simple.  D’autres fois, cette cause demeurera à jamais inconnue.  Peut-être que bébé avait seulement besoin d’attention, de caresses.  C’est un besoin réel, aussi fondamental que d’autres.  Peut-être aussi qu’il faudra s’avouer que cette fois, on est resté impuissant à consoler les pleurs.  Mais le simple fait d’avoir pris et cajolé bébé, d’avoir offert le sein, … d’avoir tenté, bref, est en lui-même constructif :  bébé prend confiance peu à peu dans la constance de ses parents ;  il reconnaît que ceux-ci sont toujours là pour lui.  Et, à force de pratique, les parents sont des interprètes de plus en plus compétents.

L’allaitement

La maman proximale allaite.  Le papa proximal soutient l’allaitement par ses mots et ses gestes.  Parce que le bébé est une personne, il a des droits, dont le droit au seul aliment conçu pour assurer son développement optimal.  Parce que l’allaitement est le remède le plus simple à la très grande majorité des pleurs du bébé :  il nourrit le ventre affamé, calme, réconforte, réchauffe, favorise le sommeil…  C’est une base solide sur laquelle se construit la communication et la confiance mutuelle.  Bref, les parents proximaux comprennent à quel point l’allaitement est plus qu’une façon de nourrir l’enfant et combien leur rôle est plus facile à remplir grâce à l’allaitement.  Quand l’allaitement est un échec, les mamans proximales sentent que leur bébé et elles-mêmes sont privés d’une part essentielle de leur relation.

L’allaitement est bien entendu pratiqué à la demande, de jour comme de nuit, non pas à l’horaire ni avec des restrictions, par respect des besoins du bébé.  L’allaitement à la demande manifeste aussi une confiance des parents dans la capacité du bébé à s’auto-réguler :  bébé sait quand il a besoin de lait et combien de temps il a besoin de boire.  Bien entendu, l’allaitement implique une proximité physique avec la mère (qui ne peut pas s’absenter en laissant son bébé bien longtemps).  Il est en outre le prétexte par excellence de contacts rapprochés, de peau à peau, de contacts visuels, de démonstrations affectueuses.

Pour la plupart des mamans proximales, l’allaitement doit être mené à terme (on parlait autrefois d’allaitement long).  Un sevrage précoce est perçu comme un manque de respect face au bébé, mais aussi comme un geste privant inutilement la mère et son enfant de moments et de contacts qui leur plaisent mutuellement.  Ainsi, l’allaitement ne cesse que lorsque l’enfant n’a plus besoin (physiologiquement) de boire du lait ni besoin (psychologiquement) de téter.  Le moment du sevrage et son rythme sont décidés par l’enfant, pas par ses parents ;  c’est ce qu’on appelle le sevrage naturel.  De façon générale, on considère que le sevrage naturel se fait vers l’âge de 3 ans.  Quand l’allaitement se termine par le sevrage naturel, le sevrage n’est plus considéré comme la fin d’une aventure, mais comme le début d’une autre :  l’autonomie (alimentaire).

L’accouchement

Il est bizarre, peut-être, d’inclure dans une liste de comportements de maternage une action qui vient avant l’arrivée du bébé, mais il va sans dire que le respect du bébé commence avant qu’il voie le jour, alors qu’il est encore caché dans le ventre de sa maman.  Je passerai très vite sur le manque de respect impliqué par des choix tels que fumer ou consommer des drogues ou des médicaments pouvant nuire à la santé du bébé, pour en venir à ce moment crucial qu’est l’accouchement.  Avant cela, un mot seulement sur le fait que les parents proximaux acceptent leur enfant tel qu’il est et que cela va, pour certains, jusqu’à refuser les examens qui révéleraient en cours de grossesse une anomalie susceptible de les entraîner vers le choix de l’avortement (trisomie, par exemple).

Le même leitmotiv de respect du bébé dans son rythme et ses capacités propres pousse les parents proximaux à désirer un accouchement entièrement naturel.  En effet, les stripping, le déclenchement du travail à l’aide d’hormones de synthèse, etc., voilà autant de façon de brusquer la venue au monde du bébé, c’est-à-dire de le faire venir avant qu’il ne s’y sente prêt.  Les interventions pendant l’accouchement, comme la péridurale (qui affecte aussi le bébé en le privant momentanément et partiellement de certains instincts) et bien sûr la césarienne, sont toutes perçues comme des obstacles majeur à l’établissement de l’atmosphère de calme et d’amour dans laquelle le bébé devrait venir au monde, mais surtout comme un désaveu de la capacité de la femme à donner naissance à son enfant et de la capacité du nourrisson à trouver son chemin vers la sortie.  Les interventions médicales sont par conséquent refusées à moins qu’elles ne deviennent absolument nécessaires.  C’est pourquoi aussi la maison de naissance, voire la maison familiale, est souvent un lieu de prédilection des parents proximaux pour le grand jour plutôt que l’hôpital.

Pour favoriser la transition entre la vie intra et extra-utérine, les parents proximaux privilégient la mise en peau à peau dès la naissance (et donc le report de la pesée et autres soins au nouveau-né), qui permet au bébé d’aller chercher le sein de lui-même en rampant pour sa première tétée plutôt que d’être mis au sein.  En outre, les parents proximaux refusent bien évidemment cette pratique (heureusement de moins en moins répandue) qui consiste à mettre les bébés à la pouponnière pendant leur séjour à l’hôpital pour garder leur nouveau-né près d’eux à chaque minute, jusqu’au retour à la maison.

Le portage

Le portage s’inscrit dans la continuité du peau à peau pratiqué après la naissance pour favoriser une transition toute en douceur entre la vie utérine et la vie extra-utérine.  Bébé s’est habitué pendant 9 mois à être bercé par les pas de sa mère, à s’apaiser et s’endormir au rythme de son coeur qui bat.  Le portage lui permet de retrouver toutes ces sources de réconfort et la chaleur maternelle.  D’autre part, il l’aide à apprivoiser son père en lui faisant découvrir son torse plus chaud et son rythme cardiaque plus lent, apaisant eux aussi.

Le portage, c’est installer bébé dans un porte-bébé, mais c’est aussi, simplement, le prendre dans ses bras, le tenir contre soi.  Les parents proximaux pratiquent généralement les deux types de portage :  avec et sans équipement. Comme ils prévoient beaucoup porter, les parents proximaux font souvent l’acquisition de plus d’un porte-bébé pour s’adapter à diverses situations.  Les écharpes (extensibles) en tous genres offrent un grand confort aux nouveaux-nés, tandis que des porte-bébés conçus spécifiquement pour le portage sur le dos, par exemple, vont permettre de porter un bébé plus vieux ou plus lourd, qui souhaite découvrir le paysage en même temps que maman ou papa.  L’important, c’est que tout porte-bébé soit physiologique :  bébé doit avoir le dos arrondis et les jambes fléchies, relevées, jamais pendantes.  Il ne doit surtout pas être suspendu par la fourche.

Le sommeil

Se séparer de son bébé toute la nuit, soit près de la moitié du temps en fait, paraît inconciliable avec la notion même de proximité.  C’est pourquoi les parents proximaux pratiquent le sommeil partagé (que l’on appelle aussi cododo).  Le sommeil partagé répond aux besoins fondamentaux du bébé en favorisant la réussite de l’allaitement et en lui permettant de calquer son rythme respiratoire sur celui de sa mère, ce qui réduit le risque de mort subite du nourrisson.  Grande source de sécurité affective, le sommeil partagé renforce aussi les liens d’attachement naissant entre le bébé et ses parents.  Il est en outre la meilleure façon d’inculquer de bonnes habitudes de sommeil à son bébé dès les premiers jours en lui permettant d’apprendre à dormir paisiblement en compagnie des gens qui l’aiment plutôt qu’à rechercher la solitude.

Même quand bébé grandit (un peu) et qu’il se couche plus tôt que ses parents et fait des siestes dont ceux-ci n’ont plus besoin, les parents proximaux continuent de voir l’importance d’accompagner leur bébé dans le sommeil.  Allaiter, bercer, porter, fredonner une berceuse, lire un conte, caresser le ventre, faire semblant de dormir ou tout simplement être là, assis ou étendu, il y a toute une panoplie de façons de faire parmi lesquelles ils adoptent leurs préférées.  L’essentiel étant cette idée selon laquelle il faut que bébé se sente en sécurité pour s’abandonner au sommeil (qui rend si vulnérable), et ce tant que bébé en ressent le besoin.

Pour un billet plus détaillé sur cette question, cliquez ici.

La garde

Les parents proximaux veulent profiter au maximum de la petite enfance de leur progéniture.  Ils savent que cela passera (trop) vite et souhaitent emmagasiner autant de bons souvenirs que possible.  Ils veulent être là quand ça compte :  recevoir le premier sourire, assister au premier repas, voir les premiers pas, la première chute, bref ne manquer aucune de ces premières fois si émouvantes.

Ils tiennent aussi compte du fait que leur bébé est (physiquement) dépendant d’eux.  Par conséquent, il est complètement désemparé et anxieux en leur absence parce qu’il n’a pas la notion du temps et n’a pas encore acquis la permanence de l’objet (un processus qui débute vers l’âge de 9 mois pour se terminer vers 18 mois, voire un peu plus tard).  Ils sont ainsi conscients que le bébé est incapable, pour se rassurer, de produire des images mentales abstraites telles que « papa est dans l’auto » ou « maman est chez le dentiste » :  la personne qui est hors de portée de ses sens n’existe plus pour le bébé.  Les parents proximaux font donc le nécessaire, selon leurs moyens, pour faire garder leur bébé le moins souvent possible, le moins longtemps possible et le plus tard possible dans sa vie.  On pourrait résumer cette attitude en utilisant les termes garde presque exclusivement parentale.

Les parents proximaux préfèrent emmener bébé en sortie et en voyage avec eux, partout où ils vont, plutôt que de le confier à ses grands-parents ou à une petite voisine pendant leurs absences.  Ils choisissent aussi de maximiser les congés de maternité, de paternité et parental pour garder eux-mêmes leur bébé au quotidien durant l’essentiel de sa première année de vie, plutôt que de le confier à une éducatrice (entrée en garderie).  Lorsque le congé se termine, l’un des deux parents (plus souvent la mère, ne serait-ce que pour préserver l’allaitement à la demande) peut choisir de rester à la maison quelques années.  Mais devenir mère au foyer n’est pas la seule option qu’envisagent les mamans proximales :  que l’un des parents occupe un emploi de jour pendant que l’autre travaille de soir, que l’un fasse son boulot à partir de la maison pendant que bébé dort, embaucher une nounou qui prend soin du bébé sur les lieux de travail de la maman travailleuse autonome, etc.  les possibilités sont aussi nombreuses que les familles proximales.  Dans d’autres cas, la mère choisira de retourner au travail avec un horaire allégé (3 jours par semaine, par exemple), ce qui permettra à une grand-mère qui n’aurait pas eu la force de s’occuper du tout-petit à temps plein de prendre soin de lui ces trois jours-là, dans sa maison, au milieu de ses affaires… et de retarder d’autant le moment où l’enfant « quittera le nid familial sécurisant » et fera son entrée à la garderie ou à l’école.

Le développement moteur

Les parents proximaux sont confiant que leur bébé a tout en lui pour se développer de façon autonome sur le plan moteur.  Ils encouragent leur bébé à découvrir ses capacités motrices par lui-même en pratiquant la motricité libre.  Ainsi, lorsqu’ils déposent leur tout nouveau bébé éveillé, ce n’est pas pour lui faire faire la bicyclette avec les jambes ou lui enseigner à se tourner du ventre au dos.  Ils  Ils le laissent sur le dos, tranquille, et attendent que bébé bouge de lui-même.  Au début, bébé ne fait pas grand-chose; il est fasciné par ses mains, soulève ses jambes…  Mais bientôt il fera sans aide et sans qu’on le lui ait jamais enseigné les gestes qui lui permettront de se retourner sur le ventre, de saisir des objets et de les porter à sa bouche, de se mettre sur les genoux, de s’asseoir, puis de ramper, se promener à quatre pattes, se lever, marcher, grimper.  Il fera ces découvertes de lui-même, à son rythme, ce qui correspond au respect de l’individualité du bébé qui anime les parents.  Ses parents ne le déposeront pas assis tant qu’il ne saura pas s’asseoir seul et ne le feront pas marcher en lui tenant les mains tant qu’il n’aura pas fait ses premiers pas par lui-même.

Cela implique aussi que, pour les parents proximaux, il ne faut surtout pas que l’enfant soit entravé dans un siège vibrant, un exerciseur ou une balançoire lorsqu’il est déposé.  Les parents proximaux comprennent que tous ces gadgets ont été inventés dans le seul but de remplacer les bras des parents, pas pour améliorer et accélérer le développement du bébé, qu’au contraire, ils mettent à mal, favorisant des positions non physiologiques.  Or, les parents proximaux ne déposent pas bébé pour se libérer les bras, ils le font principalement pour lui donner une occasion de percer les secrets de son corps et de l’univers qui l’entoure.  Ils déposent donc bébé beaucoup moins souvent que la moyenne des parents, mais le laissent beaucoup plus libre lorsqu’ils le font.

Pour en savoir plushttp://vimeo.com/9490665

La communication

La communication est au coeur de la relation entre les parents proximaux et leur bébé.  C’est elle qui permet aux premiers de découvrir les besoins du second et d’y répondre avec promptitude, affection et respect.  Je tenais à souligner sous le thème de la communication un certain nombre de pratiques parentales qu’elle entraîne disons « par la bande », indirectement.

D’abord, il y a le fait de vivre sans horaire, au gré des différents besoins du bébé.  Les parents proximaux n’imposent pas leur routine ou leur horaire à leur bébé, mais adaptent leurs habitudes aux rythmes de sommeil et d’éveil du bébé.  Ils le font boire ou manger quand il a faim plutôt que lorsque « c’est l’heure » et le couchent lorsqu’il manifeste des signes de fatigue plutôt que lorsque l’horloge le dicte.  Certains bébés sont très routiniers de nature; d’autres, davantage imprévisibles.  Dans tous les cas, les parents préfèrent être à l’écoute des signes de leur enfant que de leur montre.

Ensuite, le langage occupe une place de choix dans la relation entre les parents proximaux et leur progéniture.  Ceux-ci adorent parler à leur bébé, lui raconter ce qu’ils font, lui dirent qu’ils l’aiment et répondre à ses gazouillis par des sons similaires dans un jeu d’effet miroir qui bientôt s’inversera :  ce sera bébé qui répétera les sons produits par ses parents.  En outre, le désir de communiquer pousse un certain nombre de parents proximaux à enseigner très tôt à leur bébé le langage des signes, dont il pourra maîtriser une jolie base bien avant même d’avoir la capacité physique pour prononcer des mots.

Enfin, la communication implique pour les parents proximaux un maximum d’honnêteté à l’endroit de l’enfant.  Ainsi, ils n’hésitent pas à lui dire comment ils se sentent, même lorsqu’ils vivent des émotions négatives, notamment dans l’espoir que l’enfant apprenne à en faire autant et n’ait jamais peur de confier ses sentiments et son vécu intérieur.  L’honnêteté signifie aussi l’absence de mensonge.  Pour certains parents proximaux, cela va jusqu’à refuser ce qu’on appelle « de pieux mensonges » et le fait d’initier à une part de folklore.  Par exemple, ces parents ne feront pas croire à l’existence du Père Noël, du lapin de Pâques ou de la Fée des Dents.

L’hygiène naturelle infantile (HNI)

L’hygiène naturelle infantile est probablement la plus méconnue et la plus mécomprise des pratiques proximales.  Elle consiste tout simplement à élever son bébé sans couches.  Or, il ne s’agit pas d’enseigner la propreté à un nouveau-né, ça n’a même rien à voir avec ça.  En fait, c’est pousser le désir de communication avec son bébé qui ne parle pas encore jusqu’à son paroxysme en tentant de répondre à un besoin qu’exprime le nouveau-né mais que la plupart des parents n’entendent pas :  le besoin d’évacuer.

L’idée, c’est que tous les bébés naissent propres et manifestent leur besoin d’uriner ou de faire une selle par des signes (inconscients) d’inconfort ou des pleurs.  Ce sont les parents qui apprennent à leur bébé à « se faire dessus » en ne répondant pas à son besoin d’évacuer proprement et en lui enfermant les fesses dans des couches.  Peu à peu, le bébé s’habitue à la couche et cesse de ressentir qu’il va évacuer.  Il devra se réapproprier cette sensation innée plus tard, à l’âge de la propreté.  Pour certains parents proximaux, ignorer ce besoin d’évacuer du bébé n’est pas plus acceptable que d’ignorer les autres besoins et il y a un grand manque de respect dans le fait d’obliger le bébé à croupir dans son urine et ses excréments.

Des parents proximaux pratiquent l’hygiène naturelle infantile dès la naissance et à temps plein, d’autres attendent quelques semaines de se remettre de l’accouchement avant de s’y mettre ou pratiquent à temps partiel, c’est-à-dire qu’ils mettent une couche au bébé lors de sorties (particulièrement en hiver) ou pendant la nuit.  Dans tous les cas, ils font un geste pratiqué partout depuis les débuts de l’humanité.  Il est intéressant de se rappeler que 60% des bébés qui naissent chaque année dans le monde sont élevés sans couche et qu’il est très appréciable d’un point de vue écologique de se réapproprier cette pratique.

L’alimentation

Comme pour toutes les autres sphères du développement, les parents proximaux attendent que leur bébé montre qu’il est prêt avant d’entreprendre la diversification alimentaire, et cela plutôt que de se fier au calendrier et de commencer « parce qu’il a 6 mois aujourd’hui ».

Ils introduisent aussi les aliments sous forme de morceaux que le bébé pourra saisir avec ses doigts et porter à sa bouche lui-même, plutôt que sous forme de bouillies de céréales et de purées administrées à la cuillère.  On nomme cette façon de procéder alimentation autonome, ce qui est une traduction très libre de l’appellation anglaise Baby Led Weaning (BLW).  L’alimentation autonome s’inscrit dans la continuité de l’allaitement à la demande puisque c’est le bébé qui indique lorsqu’il a faim, mais aussi lorsqu’il est rassasié (en cessant de manger)… et que son parent lui fait confiance et respecte son appétit fluctuant et ses goûts naissants.  Bien entendu, l’alimentation autonome implique une certaine de dose de gâchis et de gaspillage au début, et le parent veille à ne pas freiner l’enfant dans sa découverte de la nourriture en le grondant pour ses maladresses et ses dégâts.  Les parents proximaux apprécient tout particulièrement que l’alimentation autonome permette que bébé mange des vrais aliments dès le départ, qu’il développe sa motricité fine et apprenne à apprécier diverses textures, ainsi que le fait que les repas se prennent en famille, dans le partage et la bonne humeur.

Pour mon avis sur l’alimentation autonome et des conseils pratiques, cliquez ici.

Le matérialisme

En parlant de motricité libre, j’ai évoqué le refus des parents proximaux de s’encombrer de certains objets inventés pour remplacer leurs bras, tels que l’exerciseur, la chaise vibrante (transat) ou le bumbo.  J’aimerais revenir sur ce point, car ce refus de biens matériels ne se limite pas aux jouets dits de développement moteur.  En fait, les parents proximaux désirent que leurs enfants apprennent dès le plus jeune âge à créer des relations saines et épanouies avec les gens qui les entourent.  C’est pourquoi ils font en sorte que, dès ses premiers mois de vie, leur bébé s’attache aux gens plutôt qu’aux objets, qu’il soit rassuré par la présence de ses parents plutôt que par celle d’une doudou.

Il ne s’agit pas tant de pratiquer la simplicité volontaire que de s’intéresser aux valeurs que les objets véhiculent.  Ainsi, posséder toute une collection de porte-bébés peut paraître tout à fait logique aux parents proximaux puisque ces objets témoignent de leur volonté de porter beaucoup bébé, dans différentes situations et positions, et à tous les âges.  Cependant, les objets qui ont pour but d’amener bébé à moins avoir besoin de contacts avec ses parents sont, pour leur part, appréhendés négativement, et leur présence dans la maison des parents proximaux est réduite au maximum.  Il en va ainsi, par exemple, des suces, biberons, dormeuse, aquarium musical, doudou, toutou et autres objets dits « de réconfort ».

La discipline

Lorsque leur bébé grandit et devient un tout-petit, les parents proximaux adoptent tout naturellement (mais non sans efforts souvent) des principes éducatifs basés sur le respect.  Ils veulent transmettre leurs valeurs à leur enfant de manière positive, par l’enseignement et l’exemple, plutôt que par la répression.  Leur discipline est, d’une part, non-violente, cela va de soi.   Ils ne souhaitent pas élever leur enfant dans une atmosphère de domination ou de peur.  Leur autorité parentale ne provient donc pas d’un rapport de force, mais est méritée en résultat d’une relation de confiance, dans laquelle l’enfant perçoit son parent comme un bon guide.

D’autre part, cela va beaucoup plus loin.  La façon de faire des parents proximaux est souvent présentée sous l’appellation bien évasive d’éducation bienveillante.  Ce mode éducatif se décline de différentes manières.  Les parents sécurisent l’environnement de l’enfant de façon à ce que ses premières explorations ne soient pas constamment ponctuées du mot « non ».  Ainsi, sans transformer leur maison en palais de ouate, ils retirent momentanément les objets dangereux (produits ménagers, ciseaux et couteau, outils, etc.) et les objets fragiles et précieux ou trop petits (souvenirs de voyage, bibelot, bijoux, etc.) de l’espace de vie de l’enfant afin que celui-ci puisse se promener, toucher, tâter, goûter sans mettre chaque fois sa vie en danger ni se faire réprimander.  L’éducation bienveillante est donc une éducation du « oui » et du « vas-y, essaie », qui récompensent l’enfant de sa curiosité.  Car réprimer constamment la curiosité naturelle de l’enfant, c’est tuer peu à peu en lui le goût d’apprendre.

Les parents proximaux invitent aussi l’enfant à verbaliser ses émotions plutôt qu’à les exprimer par des gestes violents comme mordre, taper, griffer ou pousser.  Ils ne refusent pas les émotions négatives de l’enfant ni ne tentent de l’inciter à les réprimer.  Ils mettent des mots sur les émotions de l’enfant (« tu es fâché », « tu es déçu ») pour l’aider à apprendre rapidement à les exprimer de façon saine et socialement acceptable.  Cette intervention est faite en lieu et place d’une punition, car l’éducation bienveillante est exempte de punition, de répression et de coercition.  Ce qui ne signifie pas qu’elle soit exempte de discipline, bien au contraire.  Car l’enfant a besoin d’un cadre et de limites, de balises pour se guider dans ses découvertes, et que le parent proximal veille à répondre aussi bien que possible à ce besoin comme à tous les autres.  Cependant, il le fait avec souplesse, en faisant bénéficier l’enfant de son expérience et de son vécu personnels quand cela s’avère adéquat, plutôt qu’en imposant des règles rigides dont le fondement paraît aléatoire aux yeux de l’enfant.  Et il exprime des demandes de comportements attendus de façon positive (« on laisse la porte fermée »), plutôt que d’interdire le comportement opposé (« on n’ouvre pas la porte »).

Le savoir

Enfin, je ne pouvais clore cette liste sans aborder le sujet de l’acquisition du savoir, dont la responsabilité, traditionnellement, repose dans nos sociétés occidentales sur cette institution de l’école.  La plupart des parents proximaux enverront en effet leur enfant à l’école pour qu’il apprenne.  À lire, à écrire, à compter, …  à socialiser aussi.  Pour qu’il découvre les sciences naturelles, la biologie, la musique, l’histoire, la géographie…

Mais un certain nombre de parents proximaux garderont leurs enfants avec eux à l’âge où la scolarité devrait commencer et adopteront l’unschooling.  Définir l’unschooling est une tâche ardue.  Dire que c’est un refus de l’école est simple, mais ça n’explique pas grand-chose.  Ajouter que ce n’est pas davantage l’école à la maison est une précision qui ne décrit pas beaucoup mieux en quoi consiste concrètement l’unschooling.  En fait, si l’éducation bienveillante s’inscrit avec les tout-petits dans la continuité du parentage de proximité avec les bébés, l’unschooling s’inscrit dans la même lignée, mais avec un enfant d’âge scolaire.  Le parent désire respecter l’individualité de son enfant, ses forces et ses intérêts.  Il croit aussi dans son fondamental désir d’apprendre et sa capacité à le faire.  Si l’enfant a réellement besoin de faire un apprentissage, il trouvera le moyen de le faire et demandera l’aide requise, le cas échéant, puisque le parent sera disponible et enthousiaste.  La responsabilité du parent unschooler n’est donc pas de « faire l’école » en suivant le programme à sa façon, bien au contraire, mais de créer une vie riche et remplie d’opportunités et de découvertes stimulantes pour son enfant.  Ce qui est probablement beaucoup plus difficile, mais assurément nettement plus enrichissant pour lui.

Pour en savoir un peu plus :  http://apprendreenliberte.wordpress.com/2012/06/11/je-vis-donc-japprends-une-vie-unschooling/

En conclusion

Comme ils vous le diront eux-mêmes si vous le demandez, beaucoup de parents proximaux se fient à cette petite voix du coeur qui les guide dans la parentalité :  ils écoutent leur instinct plutôt que les spécialistes, les guides de puériculture et leur médecin quand vient le temps d’agir avec leur bébé.  Tout de même, il y a parmi les parents proximaux des êtres plus « réfléchis », qui auront été convaincus par des lectures et des témoignages des bienfaits du parentage de proximité, et qui agiront donc de façon proximale avant tout par souci de faire pour le mieux, c’est-à-dire en résultat d’une réflexion rationnelle.  Ce qui est intéressant, c’est que même ceux-là deviendront au fil des mois plus intuitifs, plus instinctifs, car c’est là un des effets de ce parentage :  il confirme le parent dans sa capacité à bien prendre soin de son bébé et à faire les bons choix pour lui.  Que ce soit l’instinct ou ses lectures de spécialistes en pédopsychologie qui ont poussé le parent vers la proximité, la proximité aura cet impact positif de mener le parent à faire confiance à son instinct et à le suivre pour la suite.

 

Petit historique des raisons de ne pas aimer son enfant

Les sondages sont unanimes : les enfants, la famille sont la « première priorité » (excusez-moi le pléonasme!) des Québécois. Pourtant, les faits sont là pour démontrer le contraire. C’est le travail qui, plus que jamais, demeure la valeur fondamentale des Québécois si l’on se fie à leurs agissements plutôt qu’à leurs paroles. Les jeunes enfants passent plus de la moitié de leur temps d’éveil à la garderie, tout (magazines, vedettes, amies) pousse les nouvelles mères à penser d’abord à elles, à leur couple, avant de se consacrer à leurs enfants parce que sinon elles « s’oublient » (ce qui semble être LE crime par excellence). Sans compter les cas si nombreux d’enfants de la DPJ, de parents qui ne demandent pas la garde de leur enfant après une séparation, etc.

Pourquoi donc les Québécois sont-ils donc si convaincus d’aimer leurs enfants et si peu enclins à le manifester par leurs choix de vie ? Serait-ce que nous sommes un peuple d’hypocrites ?

Serait-ce plutôt qu’il est mal vu chez nous d’aimer ses enfants ? J’en suis de plus en plus convaincue. Ici, aimer son enfant, vouloir le meilleur pour lui, se dévouer à son développement et à son bonheur, ça dérange, ce n’est pas bien, ce n’est pas sain.  C’est s’oublier, vivre par procuration, être mère poule, excessive, dépendante affective…  Bref, c’est mal !

Mais pourquoi ?

L’Histoire de notre nation peut-elle nous inspirer des pistes de réponse ? Voilà ma petite tentative d’explication historico-non-rigoureuse.  À commenter si l’envie vous titille !

19e siècle : L’Église impose sa loi jusque dans le lit des couples québécois. Le devoir conjugal doit être accompli religieusement (oh le vilain jeu de mots !). La femme, qu’elle se sente l’instinct maternel ou pas, se doit de mettre au monde des enfants, beaucoup d’enfants.   À moins de se faire sœur.  Comme le condom et la pilule anticonceptionnelle n’existent pas encore, difficile de faire autrement de toute façon.  À moins d’aimer l’abstinence et d’accepter les remontrances du curé.  Certains prêtres se donnent même le droit d’exiger de la femme mariée qu’elle contribue à sa communauté en lui donnant chaque année, sans exception et jusqu’à se que mort s’ensuive, un nouveau paroissien. Les familles sont pauvres. Elles pratiquent une agriculture de subsistance qui les met à la merci des caprices de la météo et du risque de la « mauvaise récolte », sans parler de celles dont le lopin de terre n’a pas le sol nourricier d’avance. Elles vivent sans filet, sans sécurité sociale : quand le père décède, elles se retrouvent condamnées à la mendicité, à la charité ou, pour la mère, au remariage rapide, vu comme la seule alternative noble.

Dans ces conditions, beaucoup de grossesses ne sont pas désirées. Peut-on reprocher à ces mères, alors, de ne pas donner à leurs bébés autant d’affection qu’ils en auraient besoin ?  Bien sûr que non, elles sont humaines, l’amour ne se force pas ! Certaines femmes voient même avec appréhension la mort les rattraper à chaque grossesse : ces enfants à qui elles donnent la vie la leur volent littéralement en leur anémiant le sang. Comment ne pas comprendre les sentiments ambivalents que ces femmes peuvent entretenir à l’égard de leurs enfants, de leurs derniers-nés tout particulièrement, qui les amènent involontairement dans la tombe ?  Comment ne pas voir, avec la cuisine, la vaisselle, l’entretien de la maison, la lessive, la couture, le reprisage, alouette, qu’elles n’ont tout simplement pas de temps à consacrer à leurs bébés et à leurs jeunes enfants, qu’elles sont ravies de confier à d’autres (leurs filles aînées, une jeune sœur encore célibataire) le soin de s’occuper d’enfants pour lesquels elles n’ont pas l’énergie ?

Mais ce n’est pas tout.  L’enfant meurt souvent.  La maladie rôde, qu’on ne comprend pas encore et qu’on soigne mal.  Les bactéries dont on ne connaît pas encore l’existence ont beau jeu de se multiplier dans les aliments non réfrigérés et sur les surfaces et les corps trop peu lavés.  Et souvent, les mères affaiblies par les grossesses répétées, trop rapprochées mettent au monde des bébés de moins en moins vigoureux, de plus en plus chétifs.  Quand le taux de mortalité infantile est si élevé, aimer son bébé, c’est s’exposer à une souffrance intolérable.  C’est risquer le deuil, cruel mais si fréquent.  Mieux vaut attendre plus tard, quand l’enfant aura une dizaine d’années et qu’il aura passé à travers les épidémies et les dangers de la petite enfance (le poêle brûlant, l’eau mise à bouillir, la hache qui traîne, le froid hivernal…), quand il aura prouvé sa vigueur et sa capacité de survie.

Triste constat d’une époque où pour toutes ces raisons les parents se retiennent de prendre leurs bébés, de leur manifester de l’amour.

20e siècle :  Âge d’or de la médecine, s’il en est un.  Le médecin est respecté, adulé :  il est si éduqué, savant, et donc envié.  Les femmes n’ont pas encore repris le contrôle de leur corps, toujours sous le joug de l’Église, qu’elles le soumettent à la volonté de ce nouveau dieu.  Or, comme le prêtre, le médecin est un homme.  Et un homme de science, pour qui le calcul, la mesure, l’expérimentation, l’annotation, la précision sont les crédos.  Un homme de science qui se méfie de tout ce qui est inconnu, intuition, approximation, improvisation.  L’allaitement, déjà mis à rude épreuve par les prêtres qui le souhaitaient court (parce que c’est une méthode contraceptive beaucoup trop efficace), est maintenant banni, proscrit.  On ne sait pas combien boit le bébé, la composition du lait n’est pas stable, elle change sans arrêt, bref l’allaitement n’a pas la perfection du biberon de lait de vache pour le médecin parce qu’il le départit de son contrôle, ce qui lui est intolérable.  Parce qu’avec ses victoires sur la mort (pasteurisation, stérilisation, vaccination), la science médicale est un peu imbue d’elle-même, de même que ceux qui la pratiquent, la médecine devient un sport de compétition aussi :  les grands médecins prônent des « méthodes » et chacun souhaite voir la sienne triompher sur celles de ses adversaires.  Ainsi, c’est une course à celui dont les enfants soignés seront les plus grands, les plus costauds, feront leurs nuits, tiendront leur biberon seul, marcheront et mangeront le plus tôt.

Le médecin est devenu LA référence en matière de puériculture, s’immisçant ainsi pour son plus grand bonheur dans la dernière chasse gardée des femmes.  Or, que connaît le médecin, un homme, des besoins d’un bébé, quelle formation a-t-il sur la question ?  Rien, aucune.  Sous manteau de science, il improvise.  Et la façon la plus simple de convaincre est de faire perdre aux femmes leur confiance en leurs capacités maternelles.  Pour cela, il suffit souvent de prescrire exactement le contraire de la démarche intuitive !  Bercer un bébé pour l’endormir :  quelle erreur !  Le bébé doit s’endormir seul dans son lit, sans même être bercé (le berceau devient moïse) et en suivant cette technique on est récompensé : le bébé fera ses nuits au plus tard à six semaines !  Bébé est récalcitrant, il réclame une bouteille (sic) à deux heures du matin :  surtout on ne la lui donne pas, il n’en a pas besoin !  C’est le discours patriarcal par excellence :  la mère fait intuitivement tout de travers, elle ne doit pas se fier à elle-même parce qu’elle ne connaît rien et ne fait que se tromper ;  le bébé n’est pas conscient de ses besoins réels, il faut donc lui dicter quand manger (nourrir selon un horaire) et quand dormir, ne pas l’écouter puisque tout ce qu’il réclame n’est que caprices.

Est-ce parce que la médecine des trois quarts du 20e siècle est exclusivement masculine, est-ce parce qu’elle est d’abord scientifique, est-ce parce que l’autonomie du bébé au plus jeune âge possible est une valeur dans l’air du temps ?  Je ne sais.  Toujours est-il que l’essentiel de l’enseignement médical au 20e siècle tient à réduire au minimum les contacts physiques « inutiles » entre une mère et son bébé et qu’en prônant l’autonomie, on encourage surtout à peu s’occuper des bébés.  On enseigne aux parents qu’en prenant soin d’un bébé, en l’aimant et le câlinant, en répondant à ses pleurs, on le gâte et on le rend dépendant.  Soudain, il n’y a plus de pire insulte que « sous les jupes de sa mère ».

Et aujourd’hui ?  Coupée de ses instincts maternels pendant un gros deux siècles (7 générations au moins), la femme a du mal à les retrouver.  Elle doute d’eux ou elle les ressent peu.  Et quand elle ose enfin les écouter un peu, il y a toujours une mère, une grand-mère, une tante ou un pédiatre de la vieille école (même jeune!) pour lui dire comme autrefois qu’elle se trompe et qu’elle va gâter son bébé.  Il lui faut une bonne dose d’une confiance en ses instincts maternels (qu’elle n’a que rarement) pour faire fi de ces commentaires.

Être convaincu que donner trop d’amour est une erreur reste un lourd héritage que l’on traîne de générations en générations depuis 2 siècles.  J’ai décidé de refuser cet héritage.  À la poubelle, retenue !  Aimer mes enfants semble leur faire du bien.  Aimer mes enfants me fait du bien.